الثلاثاء، 28 يونيو 2011

CHAPITRE VII. SECOND ESSAI DE L'ANNEAU.

Il y avait pour le lendemain un petit souper chez Mirzoza. Les personnes nommées s'assemblèrent de bonne
heure dans son appartement. Avant le prodige de la veille, on s'y rendait par goût ; ce soir, on n'y vint que
par bienséance : toutes les femmes eurent un air contraint et ne parlèrent qu'en monosyllabes ; elles étaient
aux aguets, et s'attendaient à tout moment que quelque bijou se mêlerait de la conversation. Malgré la
démangeaison qu'elles avaient de mettre sur le tapis la mésaventure d'Alcine, aucune n'osa prendre sur soi
d'en entamer le propos ; ce n'est pas qu'on fût retenu par sa présence ; quoique comprise dans la liste du
souper, elle ne parut point ; on devina qu'elle avait la migraine. Cependant, soit qu'on redoutât moins le
danger, parce que de toute la journée on n'avait entendu parler que des bouches, soit qu'on feignît de
s'enhardir, la conversation, qui languissait, s'anima ; les femmes les plus suspectes composèrent leur
maintien, jouèrent l'assurance ; et Mirzoza demanda au courtisan Zégris, s'il n'y avait rien d'intéressant.
" Madame, répondit Zégris, on vous avait fait part du prochain mariage de l'aga Chazour avec la jeune
Sibérine ; je vous annonce que tout est rompu.
− A quel propos ? interrompit la favorite.
− A propos d'une voix étrange, continua Zégris, que Chazour dit avoir entendue à la toilette de sa princesse ;
depuis hier, la cour du sultan est pleine de gens qui vont prêtant l'oreille, dans l'espérance de surprendre, je ne
sais comment, des aveux qu'assurément on n'a nulle envie de leur faire.
Mais
cela est fou, répliqua la favorite : le malheur d'Alcine, si c'en est un, n'est rien moins qu'avéré ; on
n'a point encore approfondi...
Madame,
interrompit Zélmaïde, je l'ai entendu très distinctement ; elle a parlé sans ouvrir la bouche ; les
faits ont été bien articulés ; et il n'était pas trop difficile de deviner d'où partait ce son extraordinaire. Je vous
avoue que j'en serais morte à sa place.
Morte
! reprit Zégris ; on survit à d'autres accidents.
Comment,
s'écria Zelmaïde, en est−il un plus terrible que l'indiscrétion d'un bijou ? Il n'y a donc plus de
milieu. Il faut ou renoncer à la galanterie, ou se résoudre à passer pour galante.
En
effet, dit Mirzoza, l'alternative est cruelle.
Non,
madame, non, reprit une autre, vous verrez que les femmes prendront leur parti. On laissera parler les
bijoux tant qu'ils voudront, et l'on ira son train sans s'embarrasser du qu'en dira−t−on. Et qu'importe, après
tout, que ce soit le bijou d'une femme ou son amant qui soit indiscret ? en sait−on moins les choses ?
Tout
bien considéré, continua une troisième, si les aventures d'une femme doivent être divulguées, il vaut
mieux que ce soit par son bijou que par son amant.
L'idée
est singulière, dit la favorite...
Et
vraie, reprit celle qui l'avait hasardée ; car prenez garde que pour l'ordinaire un amant est mécontent,
avant que de devenir indiscret, et dès lors tenté de se venger en outrant les choses : au lieu qu'un bijou parle


Diderot_-_Les_Bijoux_Indiscrets..Mans2Day.Com.

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